Slovaquie

Dernière modification le 17 décembre 06

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Le tube slovaque de l'hiver est gay!
Non, ce n'est pas le nouveau tube des Bratislaboys! Niekto ti to povie skôr než ja qui passe en boucle sur Europe 2 -qui existe en Slovaquie-. Et cette ode à la tolérance, on la doit à l'un des groupes les plus populaires du pays. Desnod est une formation plutôt néo-grunge, voire post-crado et son chanteur boit des bières avec ses potes en faisant la tournée des festivals slovaques. Bon. Mais sous ses airs de gros durs, il ringardise les hommes politiques méprisants envers les homos et montre que la société est bien plus tolérante qu'on ne le croit, puisque sa chanson cartonne. Dans le clip, on voit un joli petit employé de bureau que l'on devine amoureux transit de son collègue, malheureusement insensible étalon qui, comme le chantait Aznavour, «passe le plus clair de son temps au lit des femmes» . À la fin, lassé par l'indifférence du bellâtre, il lui fait tout simplement un bon gros doigt d'honneur. Si les métaleux slovaques nous invitent à leur tour au fuck-off , on ne va pas se priver! 10 11 06

Une loi contre la discrimination des homosexuels
Le Parlement slovaque a décidé d'interdire toute discrimination contre les homosexuels, dans un texte de loi qui englobe le droit existant contre les discriminations, sexuelle, confessionnelle ou raciale.
Cette loi, qui a été longtemps demandée par l'Union européenne, a été approuvée jeudi dernier par 107 députés sur 133 présents du Parlement. Neuf députés s'y sont opposés et 17 se sont abstenus.
La loi, qui entrera en vigueur le 1er juillet, interdit toute forme de discrimination sexuelle alors que jusqu'à présent, la législation contre la discrimination était éparpillée dans plusieurs dizaines de textes différents et était parfois jugée trop floue par les juristes.
Mis en ligne le 24/05/04 e-llico

 

 

«Plus personne ne veut s'impliquer pour lutter»
À 28 ans, Paula est l'une des rares lesbiennes slovaques à continuer à se battre pour tenter de conquérir des droits. Assistante à l'université de Bratislava, elle a suivi des études de sociologie. Elle est l'une des auteurs du rapport sur la discrimination des lesbiennes, gays et bisexuels en Slovaquie, publié en 2002.

Vous êtes l'une des seules activistes lesbiennes en Slovaquie? J'ai fondé avec des amies l'association Altera en 1998, pour créer un lieu où les lesbiennes pourraient se rencontrer. Nous organisons des discussions, des conférences, des événements culturels, des projections. Il y a aussi une petite bibliothèque, avec une trentaine d'ouvrages sur l'homosexualité féminine ou les théories féministes. L'année dernière, nous avons réussi à mettre en place une rencontre de trois jours contre la discrimination. Il y a eu une centaine de personnes, pour nous c'était déjà énorme! Aujourd'hui nous ne sommes plus que deux à gérer Altera. En Slovaquie, il n'existe plus que trois ou quatre mouvements, qui meurent lentement. Les gens ne veulent pas s'impliquer dans de telles organisations.

La discrimination est-elle quotidienne? La plupart des gens vous diront qu'ils ne sentent pas la discrimination. Mais si vous leur demandez s'ils ont fait leur coming-out, dans la plupart des cas, ils vous répondront non ! Il est vrai que nous ne sommes pas fréquemment confrontés à des réactions ouvertement homophobes, comme cela peut être le cas en Pologne. Ici c'est plus caché, plus ténu. En Slovaquie, la population est indifférente, voire tolérante, jusqu'à ce que ça parvienne à sa porte. Mais les homos n'ont pas les mêmes droits que les autres citoyens. Les gens ne sont toujours pas habitués à voir des hommes se tenir par la main. Un couple gay est suspect, quel que soit son âge ou la situation. Je ne me souviens pas avoir vu des gays dans la rue. Dans les petites villes c'est encore plus difficile. Beaucoup d'homos essaient de venir s'installer à Bratislava, en quête d'anonymat. Ici il y a quelques cafés, deux ou trois clubs. La grande majorité des gays se rencontrent là. Ils ne s'embrassent pas ailleurs.

Qu'en est-il de la discrimination au travail? Il n'y a pas de discrimination, puisque personne n'assume son homosexualité! L'une de mes amies a milité dans des associations pendant des années. Récemment elle a changé de boulot, elle est entrée dans une société de télécommunication. Avant, elle était l'une de nos porte-parole, aujourd'hui elle doit se remettre en question. Elle n'a pas voulu divulguer son identité pendant la période d'essai de trois mois. Cette période est terminée, mais elle n'ose toujours pas. Il y a quelques  temps, les chrétiens-démocrates ont déclaré que les homos ne devraient pas être professeurs… Mais les gens ne se sentent pas réellement offensés par ces déclarations. Une autre de mes amies est elle-même professeure. Elle n'ose pas faire son coming-out, car elle a peur de perdre son emploi. Si c'était le cas, elle pourrait porter plainte, intenter un procès, puisque la loi interdit la discrimination liée à l'orientation sexuelle. Mais il faut pouvoir assumer, financièrement et psychologiquement. La réalité est très éloignée de ce que disent les textes…

L'assaut des chrétiens-démocrates
Depuis leur arrivée au pouvoir au sein de la coalition gouvernementale en 2000, les chrétiens-démocrates ont un poids croissant dans la vie politique slovaque.
Ils détiennent trois ministères clés : l'Éducation, la Justice et les Affaires intérieures. Le parti représente la troisième force politique du pays. En 2000, un traité avec le Vatican a été signé. Aujourd'hui, les cours de religion sont autorisés dans les écoles publiques. En 2002, à l'initiative des chrétiens-démocrates, une déclaration de souveraineté par rapport à l'Union européenne, sur les questions d'ordre éthique et culturel, a été adoptée par le gouvernement slovaque.
Florilège dans la presse slovaque (extraits d'articles du quotidien Praca)
Jan Carnogursky, ministre de la Justice et leader du parti chrétien-démocrate en Slovaquie (18 août 2000) : «Que ce soit bien clair… Tant que je serai ministre de la Justice de ce pays, les unions homosexuelles ne seront pas reconnues.»
Alojz Rakus, membre du Parlement et président de la Société slovaque de psychiatrie (18 août 2000) : «Alojz Rakus ne soutient aucun des arguments en faveur de la légalisation des unions homosexuelles, car il considère que l'homosexualité est une maladie mentale qui peut se soigner.»
Eva Slavkovska, ministre de l'Éducation (9 juin 2006) : «Selon le Parti national slovaque, l'emploi de professeurs homosexuels pourrait avoir une influence négative, qu'elle soit morale ou émotionnelle, sur le bon développement des enfants. Les nationalistes pensent donc que l'amendement de la loi sur l'État et le service public est scandaleux. Eva Slavkovska a souligné le fait qu'avec un tel amendement, les écoles pourraient employer n'importe quelle personne souffrant de pathologie mentale, comme les pédophiles ou les nécrophiles.» Têtu 27 04 06

La coalition gouvernementale éclate en raison de l'«objection de conscience» des catholiques La coalition libérale, formée par quatre partis de droite, a éclaté lundi 6 février, suite à la décision prise par le Premier ministre, Mikulas Dzurinda, de rejeter un texte autorisant un recul sans précédent des droits fondamentaux dans l'Europe des 25. En effet, les ministres du mouvement chrétien-démocrate souhaitaient ratifier une clause dite «de conscience» inscrite dans le traité signé avec le Vatican, qui aurait permis aux catholiques -70% des 5,4 millions d'habitants- de refuser certains actes, au nom de leur conscience, ou même de leur principes moraux. Les médecins auraient ainsi pu refuser de pratiquer l'avortement, les enseignants de professer le darwinisme et les élus d'enregistrer un partenariat homosexuel, lorsque celui-ci sera légalisé. Selon le Premier ministre, l'adoption de cette clause «risquait de donner un poids très important à l'Église catholique dans le processus de décisions séculières.» La crise est importante: elle préfigure l'installation en Europe d'un débat faisant rage aux États-Unis sur la place à accorder aux convictions religieuses dans les obligations de service. Elle révèle également le travail de lobbying effectué par le Saint-Siège dans les nouveaux pays membres catholiques. C'est en effet la première fois qu'un débat fondamentaliste est à l'origine d'une crise gouvernementale aussi grave dans l'Union européenne et divise à ce point la classe politique d'un pays membre entre partisans d'une Slovaquie «moderne», formée de partis libéraux et de gauche, appuyés par les organisations féministes et de défense des minorités sexuelles et ethniques, qui en appellent désormais à l'intervention de Bruxelles, et les partisans d'un pays conservateur et traditionaliste, sur les modèles polonais et irlandais, dans lequel les «libertés de conscience religieuse» seraient respectées.
Le 17 juin prochain, date retenue pour l'organisation d'élections législatives anticipées, la jeune démocratie slovaque, dont le président Ivan Gasparovic est populiste, devra choisir entre les deux camps, désormais bien établis sur le vieux continent. Le parti social-démocrate d'opposition est, pour l'instant, donné favori.